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Du Cadmium dans le chocolat : faut-il s’en inquiéter ?

Actualité Le 5 septembre 2025
Visuel simple aux couleurs chocolatées, montrant une tablette de chocolat noir aux côtés d'un flacon de Cadmium

Temps de lecture : 10 min | Sources : 2021-2025

Le cadmium dans le chocolat, ça fait beaucoup parler en ce moment. Les médias s’en emparent, les consommateurs s’interrogent… Mais chez Marché Pernoud, on s’est demandé : est-ce vraiment aussi grave qu’on veut bien le dire ? Pour y voir plus clair, nous avons mené la petite enquête. Si vous voulez faire le tour de la question sans dramatiser et avec des chiffres fiables à l’appui, vous êtes au bon endroit. 🍫

 

 

Qu’est-ce que le cadmium et où le trouve-t-on ?

Repartons sur des bonnes bases en comprenant ce que c'est, et d'où il vient. Le cadmium est un élément chimique métallique (métal lourd) naturellement présent dans la croûte terrestre, que l’on retrouve un peu partout dans l’environnement. Ce métal n’a aucun rôle bénéfique dans les organismes vivants et s’avère toxique lorsqu’il s’accumule en excès.

 

Dans la vie quotidienne, notre alimentation est la principale source d’exposition au cadmium (chez les non-fumeurs). En effet, les plantes absorbent facilement le cadmium du sol via leurs racines, ce qui fait que ce contaminant entre ainsi dans la chaîne alimentaire. On retrouve donc du cadmium à l’état de traces dans de nombreux aliments d’origine végétale ou animale.

 

Toutefois, certains aliments particuliers concentrent davantage le cadmium que d’autres : c’est le cas notamment des crustacés et mollusques, des abats (foie, rognons…), des graines (par exemple les graines de tournesol), des algues alimentaires, ainsi que des produits à base de céréales (biscuits, barres de céréales) et du chocolat.

 

D’autres aliments de base comme le pain, les légumes ou les pommes de terre contiennent généralement de plus faibles teneurs en cadmium, mais contribuent fortement à notre exposition du fait qu’on en consomme de grandes quantités. À l’inverse, les aliments d’origine animale courants (viandes de muscle, lait, œufs, etc.) figurent parmi ceux qui sont le moins contaminés en cadmium.

(Sources : Le Cadmium dans la nourriture | Commission Européenne - La teneur en métaux dans les denrées alimentaires d'origine animale | ANSES 2025 - Pourquoi y a-t-il du cadmium dans les sols et comment le retrouve-t-on dans l’alimentation ? | INRAE 2025.)

 

 

Comment le cadmium se retrouve-t-il dans le chocolat noir ?

Visuel simple aux couleurs chocolatées, montrant une tablette de chocolat noir et des fèves de cacao à côté d'un cacaotier

Le cacao n’échappe pas à la règle : les cacaoyers cultivés dans des sols contenant du cadmium vont absorber ce métal et le stocker dans les fèves de cacao, qui servent ensuite à fabriquer le chocolat. Le cadmium n’est évidemment pas un ingrédient ajouté volontairement dans le chocolat, c’est une contamination d’origine naturelle liée au terroir de culture.

 

Plusieurs facteurs influencent la teneur en cadmium des fèves de cacao : en premier lieu la composition du sol ainsi que son acidité (un sol acide rend le cadmium plus soluble et plus facilement assimilable par les plantes).

 

Ainsi, les fèves originaires de certaines régions ont tendance à présenter des teneurs en cadmium plus élevées qu’ailleurs du fait des conditions pédologiques locales (certains sols sont naturellement plus riches en cadmium, par ex. les sols volcaniques d’Amérique latine).

 

Heureusement, le processus de fabrication du chocolat réduit en partie la concentration de cadmium par rapport à celle des fèves brutes. Lors de la transformation, on élimine les coques des fèves (qui contiennent une fraction du métal) et on mélange souvent des fèves de différentes origines afin de diluer le cadmium présent.

 

Les fabricants de chocolat peuvent ainsi assembler des lots de cacao présentant des teneurs en cadmium variées, de manière à obtenir un produit fini de qualité constante et respectant les normes de sécurité alimentaire. En résumé, si le chocolat noir contient parfois du cadmium, c’est parce que le cacaoyer l’a puisé du sol. Mais grâce aux contrôles et aux mélanges de matière première, les niveaux retrouvés dans vos tablettes restent très faibles.

(Sources : Plomb et Cadmium dans le Chocolat | Keylink Limited 2025 - Le parcours du Cadmium dans le Chocolat | Université d’Illinois 2022 - Ce que les marques doivent savoir à propos du Cadmium | Luker Chocolate 2025 - Le Cadmium dans le chocolat - Commission Européenne.)

 

 

Quels sont les dangers du cadmium pour la santé ?

Le cadmium fait partie des contaminants toxiques à long terme : il s’accumule graduellement dans l’organisme et n’en est éliminé que très lentement. Une exposition chronique excessive au cadmium peut donc provoquer différents problèmes de santé. En premier lieu, ce métal s’attaque aux reins et peut causer des insuffisances rénales à haute dose. Il peut également fragiliser les os et affecter d’autres organes (poumons, foie) en cas d’exposition importante et prolongée. De plus, le cadmium est reconnu comme cancérogène pour l’humain et toxique pour la reproduction.

 

Les autorités sanitaires ont établi des seuils de dose tolérable afin de protéger la population de ces effets. L’EFSA (Autorité européenne de sécurité des aliments) recommande par exemple de ne pas dépasser un apport hebdomadaire de l’ordre de 2,5 microgrammes de cadmium par kilo de poids corporel (c’est ce qu’on appelle la dose hebdomadaire tolérable). En France, l’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail) a également fixé une dose journalière tolérable* similaire. C'est bien beau ces chiffres, mais concrètement, qu'est-ce que ça représente pour le chocolat ?

 

*(Dose tolérable = quantité estimée sans risque appréciable sur la santé si elle est ingérée régulièrement, d’après les données toxicologiques disponibles.)

(Sources : INRAE 2025 - Commission Européenne.)

 

 

Quels seuils réglementaires la France et l’Europe ont-ils fixés ?

Pour protéger le consommateur, l’Europe a donc introduit des limites maximales de cadmium dans les aliments. Depuis 2019, une réglementation européenne impose des teneurs en cadmium à ne pas dépasser spécifiquement pour le chocolat (ainsi que pour le cacao en poudre), avec des seuils différenciés selon la richesse en cacao du produit. Ces limites tiennent compte des habitudes de consommation : les valeurs les plus strictes concernent le chocolat au lait, davantage prisé par les enfants, tandis que le chocolat noir peut avoir une limite un peu plus élevée (puisqu’il est majoritairement consommé par les adultes). Voici les plafonds réglementaires actuels pour les produits finis vendus en Europe :

 

  • Chocolat au lait (contenant <30 % de cacao) : 0,10 mg de Cadmium par kg (poids du chocolat)
  • Chocolat noir (30–50 % de cacao) : 0,30 mg/kg
  • Chocolat noir (>50 % de cacao) : 0,80 mg/kg
  • Cacao en poudre (100 % cacao, destiné à la boisson ou pâtisserie) : 0,60 mg/kg

 

Tous les chocolats produits ou importés en Europe doivent respecter ces teneurs maximales. À titre de comparaison, le Codex Alimentarius international  (programme commun de la FAO et de l'OMS consistant en un recueil de normes, directives et autres recommandations concernant à la production et à la transformation agroalimentaires) recommande des seuils un peu plus élevés (jusqu’à 0,9 mg/kg pour certains chocolats très riches en cacao), mais l’UE et la France ont choisi une approche plus prudente afin de garantir une exposition plus faible des consommateurs.

Et pour s'en faire une idée claire, ça représente combien de grammes de chocolat par jour au maximum ?

(Sources : Commission Européenne - Université d’Illinois 2022 - OMS & FAO (JECFA) 2021 - SWI 2023.)

 

 

Combien de chocolat peut-on consommer sans risque ?

Visuel simple aux couleurs chocolatées, montrant une tablette de chocolat noir, au lait et du cacao en poudre sur des balances.

Il ne faut pas confondre la teneur maximale dans l’aliment (mg/kg) avec la dose maximale que l’organisme peut tolérer. Pour un adulte de 70 kg, la dose hebdomadaire tolérable de cadmium est d’environ 0,175 mg par semaine.

 

Vous pourriez être amené à croiser les chiffres suivant si l’on supposait que tout le cadmium venait du chocolat :

  • ~220 g/semaine de chocolat noir ≥50 % cacao (au taux maximal de 0,8 mg/kg).
  • ~600 g/semaine de chocolat au lait (30–50 % cacao) (au taux maximal de 0,3 mg/kg).

 

Mais ce raisonnement est limité : le chocolat ne représente en moyenne qu’environ 4 % de l’exposition alimentaire totale au cadmium, et les autres catégories (céréales ~27 %, légumes ~16 %, tubercules ~13 %, etc.) pèsent bien plus dans l’apport global.

 

Ces parts sont des moyennes : on ne sait pas si, dans un régime réel, leur cumul atteint ou non la dose hebdomadaire tolérable. Il est donc très difficile de fixer une “limite sûre” universelle pour le chocolat, indépendante du reste de l’alimentation.

 

En pratique, les chocolats du commerce contiennent bien moins de cadmium que le maximum autorisé. D’après une étude, la teneur moyenne mesurée n’était que d’environ 0,10 mg/kg dans des chocolats noirs courants. À ce niveau et avec cette hypothèse prudente de 4 % de la dose hebdomadaire tolérable pour les produits chocolatés), il faudrait un peu plus de 70 g de chocolat noir ≥50% par semaine pour dépasser cette « part chocolat ».

 

Ces estimations supposent que le reste de l’alimentation utilise déjà ~96 % de la dose hebdomadaire tolérable et sont donc à prendre avec des pincettes. En pratique, les teneurs réelles varient souvent en-dessous des plafonds et l’exposition totale dépend de l’ensemble du régime : il est difficile de fixer une limite universelle, mais des quantités modérées de chocolat restent compatibles avec une alimentation équilibrée et saine.

(Sources : Commission Européenne - Keylink Limited 2025 - Malaysian Cocoa Journal 2022.)

 

 

Faut-il s’en inquiéter et limiter sa consommation de chocolat ?

À la lumière de tout ce qui précède, la présence de cadmium dans le chocolat noir ne devrait pas vous empêcher de savourer votre carré quotidien. Les taux mesurés dans les chocolats commercialisés sont très bas, contrôlés par les fabricants et encadrés par des normes strictes. Consommé en quantités modérées, le chocolat n’apportera qu’une fraction minime de la dose de cadmium tolérable, d’autant plus que notre alimentation équilibrée nous expose déjà à ce métal via de nombreux autres aliments plus courants.

 

Pour un adulte en bonne santé, le risque d’intoxication au cadmium en mangeant du chocolat est donc extrêmement faible, voire négligeable. Les bénéfices potentiels du chocolat noir (plaisir gustatif, apport en magnésium, polyphénols antioxydants, etc.) surpassent largement ce petit inconvénient d’un « métal passager clandestin » en quantités très faibles.

 

Il n’est pas interdit bien sûr de rester vigilant et de modérer sa consommation de chocolat (surtout chez les enfants, qui sont plus sensibles et dont l’organisme assimile davantage les métaux lourds). Mais inutile de sombrer dans la psychose : vous n’allez pas vous empoisonner au cadmium en dégustant quelques carrés de chocolat de temps en temps, à  moins d’en manger des kilos par mois, ce qui serait de toute façon déraisonnable pour plein d’autres raisons (sucre, calories…) !

 

Comme pour tout aliment, la variété de l’alimentation est votre meilleure alliée : en diversifiant les sources (ne pas abuser chaque jour du même produit à risque), on limite automatiquement l’exposition aux contaminants.

 

Si le sujet du cadmium vous préoccupe malgré tout, voici quelques conseils simples pour réduire votre exposition :

 

    • Équilibrez et variez vos menus – Cela diluera l’apport de cadmium. Par exemple, ne basez pas tous vos petits-déjeuners sur les mêmes céréales ou biscuits au chocolat, alternez avec des œufs, des produits laitiers, etc.

 

    • Limitez la consommation excessive des aliments connus pour accumuler le cadmium. Par exemple, évitez de manger des abats ou des fruits de mer en grande quantité trop fréquemment.

 

    • Ne fumez pas ! Le tabac est une source significative de cadmium : un gros fumeur peut absorber autant de cadmium par ses cigarettes que par toute son alimentation. Arrêter de fumer réduit donc en temps normal, par 2, l’exposition totale à ce métal lourd… et présente évidemment de nombreux autres bénéfices pour la santé.

 

  • Choisissez bien vos chocolats si cela vous rassure. Tous les chocolats vendus en France respectent la réglementation, mais si vous êtes très soucieux(se), vous pouvez privilégier occasionnellement un chocolat un peu moins riche en cacao (par exemple 60 % au lieu de 80 % de cacao, ou du chocolat au lait de qualité) sachant qu’il contiendra encore moins de cadmium. Certaines marques mettent aussi en avant des contrôles renforcés sur les contaminants : libre à vous de vous informer auprès d’elles.

 

En conclusion, le cadmium dans le chocolat est un sujet réel mais relativement mineur du point de vue du consommateur. Les pouvoirs publics et l’industrie suivent ce dossier de près : des programmes de recherche sont en cours pour aider les planteurs de cacao à réduire l’absorption de cadmium (par exemple en amendant les sols acides, en sélectionnant des variétés de cacaoyer moins accumulatrices, etc.). Alors, ne laissez pas quelques microgrammes de cadmium gâcher votre plaisir et gardez en tête que la clé, c’est la modération et la variété.

(Sources : Keylink Limited 2025 - Université d’Illinois 2022)

 

Sur ce, amateurs du goût, je retourne travailler sur ma "tablette" !

 

Article rédigé par Ludovic BOULAY (amateur du bien manger)

Visuel simple aux couleurs chocolatées, montrant une tablette de chocolat noir aux côtés d'un flacon de Cadmium